Marci Vogel
publié en 2018
167 pages
Genre : roman
Titre original : Death and Other Holidays

Mon incontournable
Lorsque je choisis un livre, la lectrice passionnée que je suis a un petit rituel incontournable : lire la première et la dernière phrase pour se donner envie d’en découvrir plus.

En vidant les tiroirs de la commode de Wilson, j’ai trouvé un vieil appareil-photo et j’ai décidé de m’en servir.

[…]

Elles dessinent une piste et on roule, on roule, on roule jusqu’à décoller de l’échangeur vertigineux du Century Freeway, on fend l’air puis on plonge dans le Pacifique, l’eau nous submerge et finalement on se retrouve à nager avec les poissons rayés dans les profondeurs bleutées de l’océan.

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Ce roman de Marci Vogel, lauréat du Miami Book Fair/de Groot Prize en 2017, est arrivé dans ma pile à lire l’année dernière, après une visite à la librairie.
Comme souvent, j’ai d’abord été attirée par la couverture du livre posé sur une étagère, une couverture au doux dégradé d’un ciel d’été à l’heure où le jour et la nuit se confondent. Puis le titre m’a interpellée, l’idée de la mort et des jours de fête mêlés.

Je sais, je suis une lectrice qu’il est facile de séduire. Il me suffit d’être intriguée par un mot ou une illustration pour avoir envie de me plonger dans les pages d’un livre qui me fait de l’œil ! Parfois je suis déçue, le plus souvent je m’emballe ou je m’émeus.

« La mort et autres jours de fête » m’attirait au premier regard. Et une fois entre mes mains, ses pages feuilletées, c’est naturellement qu’il s’est invité sur une étagère de ma bibliothèque.

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April est une jeune femme qui vit à Los Angeles à la fin du vingtième siècle. À l’occasion de la mort de son beau-père, elle réalise que toutes les personnes qu’elle aimait sont mortes au printemps.
Débute alors le récit d’une année dans sa vie, entre instants de vie et souvenirs. Comme une série de clichés photographiés au hasard de ses pensées…

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Dans « La mort et autres jours de fête », Marci Vogel nous fait découvrir la vie et l’univers de cette jeune femme, fragilisée par la mort de ce beau-père qui l’a élevée et qu’elle considérait comme un second père, après la mort du sien alors qu’elle était enfant.

Le roman est découpé en quatre parties, chacune associée à une saison de l’année qui suit ce deuil. Un peu comme dans un journal intime mais sans aucune date, chaque court chapitre correspond à un moment de la vie d’April. Un peu comme si elle couchait ses pensées dans un carnet, au gré de ses envies. Parfois moments de vie au présent, parfois souvenirs de son enfance au sein d’une grande famille avec quatre tantes et de nombreux cousins ou oncles Joe.

April écrit comme si elle se parlait à elle-même. Comme si elle avait peur d’oublier un jour ses pensées. Détachée et sensible à la fois. Un peu comme ces photos qu’elle décide de prendre en retrouvant un vieil appareil photo dans les affaires de son beau-père.
« J’ai lu l’histoire de cette femme dans le journal. Elle disait qu’elle avait peur de perdre la tête, la mémoire, peur d’être effacée, alors chaque jour elle photographiait quelque chose, comme ça elle ne perdra pas sa vie le moment venu. J’ai pensé que c’était une bonne idée. »
Et comme une photographie ne nous laisse apercevoir qu’un instantané, les mots d’April sous la plume de Marci Vogel n’apportent que peu de précisions sur les lieux et les personnes que la jeune femme fréquente. Pourquoi décrirait-elle ce qu’elle connaît parfaitement puisque ces pages ne s’adressent qu’à elle-même ?

Et curieusement, c’est ce qui nous permet, lecteur ou lectrice, d’adhérer à ses mots, à sa vie. À ces petits moments de bonheur au quotidien. À ces rencontres amoureuses éphémères et décevantes. À l’émotion qui transperce sous le détachement affiché, comme dans le dernier chapitre d’automne qui a fait coulé mes larmes.

Ce roman de Marci Vogel est une très belle rencontre, « une poésie du quotidien habilement distillée » comme il est écrit en quatrième de couverture. Je ne peux que vous recommander de partir à la rencontre de la douceur et la simplicité d’April. Ne serait-ce que pour vous rappeler que toujours, la vie continue…
À retrouver aux éditions do, sur la page de l’auteur ici.