La nature et moi

Si mes racines plongent dans les Deux-Sèvres, département rural par excellence, je n’ai pas hérité du talent de ma famille pour tout ce qui touche à la terre.

Je me souviens avec tendresse du jardin de mes grands-parents. Mon goût pour les petits pois crus, les carottes croquantes, les haricots verts tous juste blanchis. La grande bassine à confiture et les pots de gelée de groseilles cuite au soleil. La délicieuse odeur des tartes aux mirabelles.
Du côté de ma mère, c’étaient plutôt les fleurs. Les jardinières de géraniums qu’il fallait sortir du sous-sol dès les beaux jours. Les rosiers qui embaumaient tout autour de la maison. La bordure de muscaris et celle d’œillets. La beauté du cerisier fleur qui s’épanouissait en un tapis de pétales roses sur le sol au premier coup de vent.

J’aime la nature, celle domestiquée de mon enfance et celle plus vaste, plus sauvage, dans laquelle je ne m’aventure guère. Mais la nature me rend bien mal mon affection puisque je suis incapable de faire pousser le moindre végétal sans qu’il ne dépérisse à mon contact !
J’ai essayé.
Cactus, yucca, pois de senteur, iris – mes fleurs préférées – bambou, bruyère et autre bougainvillier… Même des aromates, ciboulette ou basilic.
J’avoue que ne pas les arroser ne doit pas aider, mais ça n’a pas toujours été le cas. J’ai fait des tentatives, des efforts, puis j’ai fini par me faire une raison : tout succombe sur mon passage.

 

Le « Llama Planter »

C’est pourquoi je trouve particulièrement courageux de la part de Chamallow de m’avoir offert ce « Llama planter », statuette de terre en forme de lama dont le pelage sera formé de graines de chia germées – normalement !
Je n’ai pu m’empêcher de m’exclamer « Le pauvre, il risque d’avoir un pelage tout rabougri ! » quand j’ai ouvert le carton. Mais je suis joueuse et je n’ai pas encore complètement renoncé à l’idée de faire pousser quelque chose de mes deux mains.

Alors c’est parti pour ce défi printanier, que je vous ferai partager avec humour.

À l’intérieur de cette jolie boite, se trouve Monsieur Lama – « Quand lama fâché, señor, lui toujours faire ainsi… », merci Tintin ! – et un sachet de graines de chia qui doivent me permettre de faire trois tentatives. Ça c’est une bonne idée, si ça ne marche pas du premier coup, je pourrai toujours réessayer.

Bon, le mode d’emploi est intégralement en anglais mais armée de mon fidèle Google Traduction, je n’ai peur de rien. Et je ne sais pas ce qui fait le plus rire Chamallow, mon accent à la Cyril Abiteboul ou mon insistance à utiliser le traducteur pour les mots les plus simples, juste au cas où.

 

Jour 1

La première étape consiste à immerger le lama dans l’eau pendant une demi-heure.
Facile !
Je remplis l’évier d’eau froide et j’y plonge la bête… qui est plus haute que prévu, elle persiste à sortir la tête de l’eau. J’ai même l’impression qu’elle me nargue avec ce petit sourire hautain.
Qu’à cela ne tienne, je l’allonge et elle pique une petite sieste au fond du bac.

La deuxième étape est visiblement la plus cruciale : il s’agit de mélanger la bonne quantité de graines de chia avec la bonne quantité d’eau pour obtenir une texture gélatineuse qui devra tenir sur les rainures du corps du lama. Trop solide ou trop liquide, ça ne marchera pas.
Le mode d’emploi est extrêmement précis à ce sujet, deux teaspoons de graines de chia pour 1/4 cup d’eau… Mouais…

Je sors une banale cuillère à café, mais Chamallow me tend une cuillère à thé, plus petite – oui, nous avons UNE cuillère à thé, qui ne sert absolument jamais. Bref, je prélève deux cuillères à thé de graines de chia, que je dépose précautionneusement dans une soucoupe plate.
Pour la quantité d’eau, je m’interroge. Un quart de tasse, c’est vague. Il y a de la marge entre la petite tasse à café et le mug du petit-déjeuner, et je ne parle même pas du big mug de Chamallow ! Je finis par verser quatre cuillères à thé d’eau sur les graines, avant d’en rajouter deux autres, pour que ça couvre toute la surface de mon récipient.

Je touille et tou-touille régulièrement pendant une demi-heure comme indiqué dans le mode d’emploi, ça devient effectivement gélatineux. Je suis trop forte !
Au bout des trente minutes réglementaires, je sors mon lama de l’eau, je l’égoutte et le dépose sur une assiette plate sur laquelle il a fière allure.
Me voici prête pour la suite.

La troisième et dernière étape du jour consiste, vous l’aurez sans doute deviné, à étaler les graines de chia gélatineuses sur le corps rainuré du lama, en une couche fine et régulière, avec les doigts ou la cuillère.
Première tentative avec les doigts, peu efficace. Les graines préfèrent la douce et chaude texture de ma peau à celle, dure et froide, du lama en terre. J’en ai partout sur la main, ça ne veut plus partir.

Je racle mes doigts avec le dos de la lame d’un couteau et c’est parti pour une seconde tentative, armée de ma désormais fidèle cuillère à thé. Et ça marche beaucoup mieux. Enfin, jusqu’à ce que je m’aperçoive que les graines, déposées sur le haut du dos du lama, se retrouvent sous son ventre en quelques secondes. Ça glisse de partout sur les rainures et ça ne fait pas du tout homogène comme répartition.
Je lutte contre la gravité, récupère les graines du bas pour les remettre en haut jusqu’à ce qu’elles restent plus ou moins en place, de tous les côtés. Ce n’est pas parfait, mais je ne ferai pas mieux.

Je dois à présent laisser sécher les graines pendant deux jours, sans rien faire.
On est samedi soir, on se retrouve donc lundi soir, Monsieur Lama !