Chimamanda Ngozi Adichie
publié en 2003
416 pages
Genre : roman
Titre original : Purple Hibiscus

Mon incontournable
Lorsque je choisis un livre, la lectrice passionnée que je suis a un petit rituel incontournable : lire la première et la dernière phrase pour se donner envie d’en découvrir plus.

À la maison la débâcle a commencé lorsque Jaja, mon frère, n’est pas allé communié et que Papa a lancé son gros missel en travers de la pièce et cassé les figurines des étagères en verre.

[…]

Les nouvelles pluies vont bientôt tomber.

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Après avoir choisi les douze catégories du Challenge Lecture 2020, Chamallow et moi avons commencé nos recherches sur Internet. Certains titres se sont imposés assez rapidement et j’ai fait une première sélection, entre les livres disponibles à la bibliothèque municipale et ceux que je devrai acheter (dans un deuxième temps).
Munie de ma liste, j’ai profité d’une fin d’après-midi tranquille pour aller renouveler mon abonnement et envoyer la bibliothécaire chercher un auteur inconnu d’elle dans la réserve peu éclairée !

Pourquoi « L’hibiscus pourpre » de Chimamanda Ngozi Adichie pour débuter ce challenge ?
Tout d’abord parce qu’à ma connaissance, je n’ai jamais lu aucun auteur africain. Ce n’est ni un choix délibéré, ni un oubli de ma part. C’est juste que le monde de la littérature est si vaste qu’il faudrait plusieurs vies pour tout découvrir. Mais c’est justement le but d’un challenge lecture, s’aventurer hors de sa zone de confort.
Et donc, je suis partie en quête d’ouvrages de littérature africaine sur Babelio, site très pratique pour les recherches thématiques. Dès la première page d’une vaste sélection, le titre de ce roman a attiré mon attention. Je le trouvais fleuri, poétique. Bien sûr il n’était pas le seul à m’interpeller, mais la quatrième de couverture me donnait envie d’en savoir plus. Et la dernière phrase du résumé m’a convaincue, « L’Hibiscus pourpre est un roman bouleversant sur la fin de l’innocence, la violence domestique, l’intolérance religieuse et l’émancipation. »
Des thèmes prometteurs. C’était gagné, j’avais envie de le lire.

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Avec ses mots, Kambili, quinze ans, raconte le jour où la vie de sa famille a basculé, en ce dimanche des Rameaux.

Avant, tout n’était que rigueur religieuse sous la coupe de son père, riche homme d’affaire et propriétaire du seul journal indépendant du Nigeria. Un homme public admiré pour son courage politique, sa générosité.
Mais un homme qui se révèle un tyran familial, une fois passés les murs de la luxueuse maison d’Enugu. Un homme qui traque jusqu’à l’idée du péché, condamne sans aucune indulgence ceux qui respectent les rites païens ancestraux. Pourtant les violentes punitions qu’il inflige à ses enfants, à sa femme n’entament en rien l’amour que ces derniers lui portent.
Jusqu’au jour où Kambili et son frère passent quelques jours chez leur tante et découvrent une vie différente, simple et pleine de rires malgré les difficultés.
Les graines de la révolte sont semées…

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Premier roman de Chimamanda Ngozi Adichie dont je vous invite à découvrir le site (en anglais), « L’hibiscus pourpre » ne peut laisser indifférent.

À travers les yeux d’une adolescente réservée, l’auteure nous fait pénétrer dans l’univers intime de la violence familiale. Beaucoup de pudeur dans le choix des mots, dans les silences. Beaucoup d’amour aussi, car Kambili ne cesse jamais d’aimer et de chercher l’approbation de ce père admiré publiquement pour sa générosité et son engagement. Dans sa vision du monde, les violences sont vécues comme « normales ».
« – Le diable vous a-t-il demandé à tous de faire ses courses pour lui ? » Les paroles en ibo jaillirent de la bouche de Papa. « Le diable a-t-il planté une tente dans ma maison ? » Il se tourna vers Mama. « Tu la regardes profaner le jeûne de l’eucharistie sans rien faire, maka nnidi ? »
Il déboucla lentement sa ceinture. C’était une grosse ceinture faite de plusieurs épaisseurs de cuir marron, à la boucle sobre recouverte de cuir. Elle atterrit d’abord sur Jaja, en travers de son épaule. Puis Mama leva les bras quand elle atterrit sur le haut de son bras, couvert par la manche bouffante pailletée de son corsage de l’église. Je posai le bol juste au moment où la ceinture atterrit sur mon dos.
»
Et pourtant… « Ce soir-là, je m’endormis en serrant contre moi l’image du visage radieux de Papa, le son de la voix de Papa me disant qu’il était très fier de moi, que j’avais réalisé le dessein de Dieu pour moi. »

Toute la première partie du roman nous présente la vie quotidienne de la famille avant le jour où Jaja, le frère aîné de Kambili, se révolte pour la première fois. C’est une partie longue, plus des trois quarts des quatre cents et quelques pages.
Si à la lecture j’ai parfois éprouvé un peu de lassitude face à certaines longueurs, ou le manque de progression dans l’histoire, j’ai réalisé une fois le roman terminé, que cette partie reflétait bien le caractère de Kambili, la narratrice. Posée, sérieuse, contrôlée. Aucune place pour la spontanéité ou la joie de vivre dans son quotidien.
Le départ chez leur tante est comme une aventure, à la fois grisant et effrayant. Surtout déconcertant. La vie chez Tatie Ifeoma est tellement éloignée de ce qu’ils connaissent. Une conception différente de la même religion. Une ouverture. Une révélation.
Parce que oui, la religion est très présente dans « L’hibiscus pourpre ». L’histoire se déroule au Nigeria, mais elle pourrait se dérouler n’importe où, partout où l’intégrisme tente d’étouffer une plus grande ouverture du culte.

Je ne connaissais rien du Nigeria avant de commencer ce roman. Au fil des pages, son vocabulaire, sa gastronomie, sa culture se révèlent sous la plume de Chimamanda Ngozi Adichie. Un dépaysant voyage littéraire qui me donne envie d’en découvrir plus.

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Challenge Lecture 2020

  • un roman d’un auteur africain

Les autres catégories du challenge sont à découvrir ici.