Émile Zola
publié entre 1878 et 1884
128 pages
Genre : nouvelles
Cet ouvrage est un recueil de quatre nouvelles d’Émile Zola – « La mort d’Olivier Bécaille », « Nantas », « L’inondation » et « Les coquillages de M. Chabre » – à l’origine publiées indépendamment les unes des autres et réunies uniquement dans cette collection.
Je trouve toujours difficile de parler d’un recueil de nouvelles comme d’un tout, sauf lorsqu’elles ont une unité évidente. C’est pour cette raison que, plutôt que d’écrire un « mini-article » pour chaque texte, j’ai choisi de m’intéresser plus particulièrement à celui qui m’inspire le plus.
Mais pas d’inquiétude, je dirai quand même quelques mots sur les autres !
L’inondation, nouvelle d’Émile Zola
Mon incontournable
Lorsque je choisis un livre, que ce soit en librairie, à la bibliothèque ou sur les étagères d’un ami, la lectrice passionnée que je suis a un petit rituel incontournable : lire la première et la dernière phrase pour se donner envie d’en découvrir plus. Et c’est parfois très parlant !
Je m’appelle Louis Roubieu.
Je les regarde, et je pleure.
Histoire de passer le temps entre deux visites à la bibliothèque, j’ai demandé à Chamallow de me prêter un roman, je cite, « court et vite lu », un moyen facile de cocher la catégorie du livre prêté du Challenge Lecture 2018 des Éditions J’ai lu. C’est comme ça que je me suis retrouvée à choisir entre ce recueil de nouvelles d’Émile Zola et « Comment chier dans les bois » de Kathleen Meyer, un ouvrage évoqué dans le vingtième numéro du podcast « On achève bien les endives » que vous pouvez découvrir ici : Le podcast qui ne se fait pas que des amis à la Licra.
Je dois vous avouer que je n’ai pas vraiment hésité, même si je suis persuadée que les deux méritent autant d’être lus. Mais là, j’avais plus envie d’une lecture détente que d’une lecture réflexion.
Troisième nouvelle de ce recueil, « L’inondation » nous raconte une crue de la Garonne qui détruit un village et la vie d’une famille paysanne prospère en l’espace de quelques heures.
La raison qui me fait m’attarder sur cette nouvelle plutôt qu’une autre, c’est le réalisme avec lequel Émile Zola décrit cette crue soudaine du fleuve et les réactions humaines face à la mort qui rattrape cette famille qui se croyait à l’abri du malheur. « Notre maison semblait bénie. Le bonheur y poussait ; le soleil était notre frère. […] Je devais avoir gagné là-haut l’amitié de quelque saint ou du bon Dieu lui-même, car toutes les chances dans le pays étaient pour nous. » Un mélange de naïveté et d’arrogance.
Plutôt que de fuir la montée des eaux, la famille sous la conduite du patriarche narrateur s’installe au deuxième étage de la maison, « Vite ! vite ! criai-je. Il faut rentrer… La maison est solide. Nous ne craignons rien. » Tous se croient en sécurité, protégés. Ils continuent de vivre, riant, jouant aux cartes, minimisant les risques. Ils sont inconscients du danger… jusqu’à ce que l’eau effleure la fenêtre et que la réalité de la mort de leurs servantes, le plancher de leur chambre s’étant écroulé sous leurs pieds, les frappe de plein fouet.
Réfugiés sur le toit, ils attendent les secours du village voisin… ou la mort. C’est à partir de cet instant que je trouve le récit le plus intéressant. Les réactions se diversifient, allant de l’héroïsme (futile) au fatalisme, sous le regard brisé du narrateur. Sapées par la puissance du courant, les maisons s’écroulent sous ceux qui tentent de rejoindre le clocher de l’église par les toits. Le radeau de fortune se désagrège sous la violence des chocs, égrainant les corps dans les flots déchaînés. L’amour même ne peut rien face à cette force de la nature. Stupeur, folie…
Un seul survivra, sans savoir pourquoi ni comment. « Les eaux ont eu la cruauté de ne pas m’emporter après tous les miens, pendant que je ne sentais plus mon malheur. C’est moi, le vieux, qui me suis entêté à vivre. Tous les autres sont partis, les enfants au maillot, les filles à marier, les jeunes ménages, les vieux ménages. Et moi je vis ainsi qu’une herbe mauvaise, rude et séchée, enracinée aux cailloux ! »
Un récit sans fioriture inutile, dans la pureté du réalisme. J’ai aimé.
Les autres textes de ce recueil de nouvelles d’Émile Zola
Dans « La mort d’Olivier Bécaille », Émile Zola nous livre le récit d’un homme soudain prisonnier de son corps immobile, qui assiste impuissant à la réaction de ses proches qui le croient mort et à ses propres funérailles.
Le point de vue est intéressant et joue sur une peur répandue, celle d’être enterré vivant.
La deuxième nouvelle de ce recueil, « Nantas », nous brosse en quelques scènes/chapitres les moments-clés de la vie d’un jeune homme brillant mais pauvre, qui accepte pour réussir d’épouser une jeune femme noble et enceinte dont il reconnaît l’enfant comme le sien.
Malgré les sommets auxquels il parvient, Nantas reste un arriviste aux yeux de sa femme qui le méprise. Brûlé par la passion qu’elle lui inspire malgré lui, la jalousie et le désir de gagner son amour, il s’élève toujours plus haut, jusqu’à ce moment où seule la chute est possible.
Ironie de ce moment final qui le ramène au tout début.
Enfin, « Les coquillages de M. Chabre » est une nouvelle légère à l’intrigue vue et revue mais savoureuse sous la plume de Zola.
M. Chabre, bourgeois et ancien marchand de quarante-cinq ans, a épousé la blonde Estelle d’une vingtaine d’années plus jeune que lui. Son grand chagrin étant de ne pas avoir d’enfant, il consulte un médecin qui lui conseille les bains de mer et une cure de coquillages. Le couple part donc s’installer pour quelques semaines dans un village de la côte Atlantique. Là, ils font la connaissance d’Hector, jeune homme timide et bien élevé d’une ancienne noblesse de la région. De chastes baignades en promenades dans les rochers, le rapprochement entre les jeunes gens est inévitable sous le regard aveugle du mari qui ne songe qu’aux coquillages. Une dernière expédition dans des grottes côtières les laisse tous deux prisonniers de la marée tandis que M. Chabre ne songe qu’à son dernier repas de fruits de mer.
« Peu à peu, l’eau entrait dans la grotte, roulant avec un bruit doux des graviers transparents. Elle y apportait les voluptés du large, une voix caressante, une odeur irritante, chargée de désirs. […] Neuf mois après son retour à Paris, la belle Mme Chabre accouchait d’une garçon » tandis que son mari s’étonne « que les coquillages eussent une pareille vertu. »
C’est amusant, c’est maintenant que j’ai terminé le résumé de toutes les nouvelles de cet ouvrage que je me rends compte qu’il existe finalement un point commun entre elles : l’humain. Ressentis, réactions, relations. Ce qui n’est pas surprenant quand on connaît un peu l’auteur et son œuvre.
Qui sait, cela me donnera peut-être l’envie d’en découvrir plus, ce que mes cours de français du collège n’avaient pas réussi à faire.
Challenge Lecture 2018
- Un livre qu’on vous a prêté ou qu’on vous a offert
Mais ce livre pourrait également cocher la catégorie suivante :
– Un livre sur la mort ou le deuil
Les autres catégories du challenge sont à découvrir ici.