Claude Sarraute
publié en 1998
217 pages
Genre : roman
Mon incontournable
Lorsque je choisis un livre, la lectrice passionnée que je suis a un petit rituel incontournable : lire la première et la dernière phrase pour se donner envie d’en découvrir plus.
Au tableau noir, Mme Florent, la cinquantaine épanouie, pleine d’enthousiasme et de sérieux, inscrit à la craie en les soulignant les mots clés de son exposé.
[…]
Parce qu’avoir deux petits hors mariage, ça fait un peu olé olé à notre âge !
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Croisé au hasard d’un détour sur les étagères de notre chambre qui croulent sous les livres, ce roman de Claude Sarraute a attiré mon attention pour plusieurs raisons.
Le nom de l’auteur d’abord, qui m’évoquait l’émission des Grosses têtes que ma mère écoutait sur RTL quand j’étais petite. La couverture colorée ensuite, qui présente une salle de classe peu studieuse, ce qui interpelle toujours la fille d’instit’ que je suis. Et la notation peu flatteuse sur Babelio qui m’a rendue curieuse de découvrir par moi-même la raison de ces critiques.
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Dans « C’est pas bientôt fini ! », Claude Sarraute nous fait partager la vie de Muriel et Vincent, deux professeurs dans un collège de ZEP.
Lui est prof d’histoire-géo, à l’aise dans ses baskets avec ces mômes défavorisés. Elle est prof de lettres, sans autorité aucune, chahutée et peu appréciée, bossant pour l’agreg’ et rêvant d’élèves bien éduqués et désireux d’apprendre.
Ils se sont connus et aimés dans ce collège de banlieue parisienne. Au point de se marier et d’avoir un enfant. Puis se sont désaimés, déchirés, éparpillés pendant que la mère de l’une et le père de l’autre rapprochaient gentiment leurs solitudes. Tout en tirant les ficelles avec plus ou moins de succès pour rabibocher le jeune couple.
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Dès les premières pages, on est dans l’ambiance. D’un collège de ZEP et du style du roman. C’est perturbant. Parce que ça part dans tous les sens, l’histoire et les phrases. On est limite dans l’intimité de la construction du roman en le lisant.
« Je vous entends d’ici : ça va durer encore longtemps, cette valse-hésitation ? Ils vont se décider, oui, Muriel et Vincent ? Qu’ils s’expliquent une bonne fois pour toute et qu’on en finisse ! Moi, je ne demanderais pas mieux, mais je suis comme Muriel, je ne sais ni où ni quand ni comment amener ces deux têtes de mule à se remettre ensemble. »
Un auteur qui ne sait que faire de ses personnages, ça me rappelle il y a une dizaine d’années, mes premières histoires de Sims, quand je laissais le jeu guider mes pas, les péripéties de l’histoire. Sauf que ça se passait dans ma tête. C’est déroutant à lire.
C’est comme un commentaire de l’auteur sur sa propre histoire. Avec les idées qui fusent à cent à l’heure et les mots qui se bousculent dans les phrases. On débute au présent, on fait un détour au passé, une parenthèse dans la supposition avant de revenir au présent, le tout en une phrase de quatre ou cinq lignes. Et avec un registre familier, parlé populaire. Ça sonnerait peut-être mieux à l’oral, lu à haute voix, un peu théâtre de boulevard.
Quant à l’histoire, elle est banale. Ils s’aiment, ils s’éloignent, vont-ils se retrouver ? La base de nombreux romans à l’eau de rose. Sauf que dans « C’est pas bientôt fini ! », les ingrédients peinent à se mélanger, ça fait des grumeaux indigestes, c’est aromatisé de clichés.
Bref, aucune alchimie. On ne parvient pas à s’intéresser réellement aux personnages, à s’enthousiasmer ou se désoler pour eux, pour les péripéties que Claude Sarraute leur colle dans les pattes. Et c’est dommage.
Je reste sur ma faim, mais au moins, ça se lit vite. Idéal pour passer un (bon) moment pendant un trajet en train ou un après-midi de farniente à l’ombre du parasol. Mais sans atteindre le niveau roman Feel good…